De l’importance des guitares ! The story of Sahel guitars

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            La musique appelée « Blues touareg » est de plus en plus connue dans le monde entier. Elle est très enracinée dans la culture du peuple Touareg (dans leur langue : Tamacheq). Elle se joue à la guitare, à la basse, aux percussions diverses (batterie, djembé, tambourins…), et est devenue un emblème culturel de ce peuple du Sahel.

The so called « Tuareg Blues » music is known by more and more people all around the world. Its roots are deeply burried into Tuareg culture (in their language : Tamasheq). It’s played using guitar, bass guitar and various percussion instruments such as the drums, jembe, tambourine etc.), and it became one of the cultural emblems of this Sahel people.

Ces guitares qui résonnent sur ces rythmes lancinants n’existaient pourtant pas dans la musique traditionnelle tamacheq. Il y a bien des instruments à corde comme le tehardenou la vielle imzad, mais pas de guitare, et pas de basse.

In fact, this kind of guitar sound along these repetitive rythms did not exist in traditional Tamasheq music. String instruments do exist, such as teharden or imzad, but no guitars nor basses are played.

Alors d’où viennent ces guitares ? Leur histoire est belle. Dans les années 1970, le Mali est en crise politique. La France libère les pays du Sahel qu’elle avait colonisés, et des frontières sont tracées à travers le désert sans consultation des habitants. Ces frontières divisent le territoire parcouru par les Tamacheq et empêchent leurs déplacements nomades qui constituent leur mode de vie. Les Tamacheq s’insurgent et réclament leur auto-détermination ainsi que le droit à se déplacer librement. Leurs villages sont massacrés, et au même moment une sécheresse grave sévit sur le Sahel. La situation est intenable, et de nombreux Tamacheq s’exilent dans les pays voisins : en Algérie et en Libye.

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So where do guitars come from ? Their story is emotional : during the 70’s, Mali is going through a political crisis. France retires from Sahel country she possessed as colonies, and new borders are drawn through Sahara desert which inhabitants are not let any say about it. These borders divide Tamasheq territory and prevent the nomad way of life communities to move as they’ve always been doing. Tamasheq people thus put up a protestation movement in order to claim back their sovereignty upon their lands and the right to travel freely. Entire Tamasheq villages are killed, as a severe drought causes multiple damages on the Sahel. Situation is deadly, and a lot of Tamasheq face no choice but to exile to the neighbouring countries : Algeria and Lybia.

L’exil est dur dans les camps de réfugiés. Les conditions de vie sont précaires, le pays natal est loin, la famille et les amis manquent, les nouvelles sont rares. C’est là, dans les années 1980, que se rencontrent Ibrahim Ag Alhabib, Alhassane Ag Touhami et Abdallah Ag Alhousseyni. En écoutant les musiciens qui se retrouvaient pour jouer dans les camps, les trois amis ont l’idée de jouer la musique tamacheq à la guitare, acoustique d’abord, puis électrique. Le groupe Tinariwen est né.

Exile in refugee camps is harsh. Living onditions are precarious, homelands are far away, family and friends are missed, news come scarce. Here, in these camps, in the 80’s, Ibrahim Ag Alhabib, Alhassane Ag Tuhami and Abdallah Ag Alhusseyni meet each other. As they spend time listening to musicians gathering to play in the camps, the three friends think about playing Tamasheq music using the guitar. Acoustic guitars at first, and then electrics. This is how the band Tinariwen is born.

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Tinariwen, musiciens engagés pour le peuple Tamacheq. Leur but : faire la révolution pour leur liberté et leur reconnaissance ! Mais pas avec des armes, pas avec des batailles, non. Avec des guitares, par l’art, par la musique. Tinariwen, avec plus de trente ans d’existence et une dizaine d’albums à son actif, est l’exemple du pouvoir de l’art et de la culture. Grâce à la musique, ils font fièrement vivre et connaître la civilisation tamacheq, ils expriment la souffrance et la colère des peuples du désert oubliés et ignorés depuis longtemps. Tinariwen est le commencement d’une révolution culturelle, et dans son sillage suivent des groupes pareillement engagés tels le groupe de femmes Tartit, le chanteur aux influences rock Bombino, Terakaft, etc.

Tinariwen engages politically and socially in the struggle of Tamasheq people. Their goal is to give the revolution for liberty and recognition a new breath ! But forget about weapons and battles, please. They’re fighting with guitars, with art, with music. Tinariwen, aged more than thirty years, with about ten albums released, is an exemple of the power of art and culture. Their music is making proudly live Tamasheq civilisation, and making Sahel people known all around the world. Tinariwen songs tell about the anger of desert peoples, ignored long ago, and the sufferings they endure. They are the starter of a cultural revolution, and in their wake follow bands of same willpower and engagement : women-only band Tartit, rock-n’roll influenced Bombino, Terakaft… Today, it’s the turn of brand new Tisdass to come and join the numbers for Sahel revolution.

Et le très récent groupe Tisdass s’ajoute, lui aussi, au rang révolutionnaire sahélien.

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Depuis, le « Blues du désert » se fait connaître à travers le monde : en Europe, mais aussi en Amérique du Nord où les groupes vont parfois enregistrer leurs albums. Il est la preuve vivante que l’art permet de transmettre des messages forts en touchant beaucoup de monde. Les groupes de musique tamacheq savent s’adapter et vivre avec leur temps, comme en témoignent leur foisonnement musical et les textes de leurs chansons toujours plus actuels, les plus récents évoquant l’épidémie de SIDA, les causes féministes, ainsi que l’importance de l’union et de la solidarité entre Tamacheq mais aussi entre peuples du Sahel pour la reconnaissance de leur existence et de leurs droits.

« Desert Blues » has been known about around the world ever since. In Europe, of course, and North America where bands are sometimes recording their albums. These bands are the living proof that art can deliver important messages to a large part of people. These bands know how to adapt and live the times going : their music variety and their contemporary texts, more recent of which tell about AIDS, feminism problematics, and the importance of fellowship and solidarity among Tamasheq, and furthermore : among Sahel peoples, in order to achieve recognition of their existence and their rights.

Il est vrai que les troubles sociaux et politiques engendrent des conditions de vie difficiles voire impossibles. Dans le cas du Sahel, les catastrophes naturelles telles que la sécheresse viennent empirer les choses. Famines, maladies et absence d’accès à la santé, absence d’accès à l’instruction, terrorisme et trafics, exactions politiques, pollution environnementale sont les fardeaux les plus lourds pour les peuples sahéliens. Cependant, le génie de Tinariwen et de leurs successeurs est d’axer leurs luttes sur la civilisation et la culture par la promotion de la musique et de la langue tamacheq, car ils ont compris très tôt que perdre sa culture, c’est perdre son humanité.

Grâce à la musique, grâce la culture, le peuple Tamacheq est toujours bien vivant et dynamique, et la voix des peuples sahéliens se fait entendre à travers le monde pour que plus personne ne soit négligé ni oublié, pour la fraternité et pour la liberté.

Indeed, society and political troubles lead to precarious, when not simply impossible, living conditions. Concerning the Sahel, natural phenomenons such as drought only make it worse. Starvation and severe diseases with no healthcare nor education system, all kind of trafics and terrorism, political mayhem, industrial contamination of a fragile ecosystem such as the Sahara desert : every single of which makes it harder to bear for Sahel peoples. But Tinariwen and their followers do not lack of genius : they have long understood that their struggles need to be focused on civilisation and cultural heritage by the means of music, for losing culture is losing humanity.

Thanks to music, thanks to culture, Tamasheq people has survived, and is more lively than ever. The voice of Sahel people is sounding around the world, not letting anyone forgotten nor ignored, singing for fraternity and freedom.

 

  • Arthur Hugonnot

Sources :

– France Inter, Tinariwen : du Blues dans le désert, Rebecca Manzoni, Flora Bernard, Hugo Combe, 16/02/2017.

– Le Monde, Tinariwen, rebelles des dunes, Patrick Labesse, 05/02/2007.

– France Culture, Blues touaregs, Amaury Chardeau et Pascaline Bonnet, 01/09/2018.

– Rollingstone, Le blues Touareg de Tinariwen continue son long voyage, Julien Gaisne, 22/04/2014.

– François Bensignor, Musiciens du Sahara, dans : Hommes et migrations, 2004, 1252, pp.100-106.

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